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Le blog de l'APGL Grand Est
29 mai 2010

Dossier Libération du 26 mai suite

«Un impact social, culturel, politique, économique»
Interview

_Lib__4_Minoo Moallem, responsable des «gender studies» à l’université de Berkeley :

       

Par LORRAINE MILLOT Washington, de notre correspondante


    Sociologue d’origine iranienne, Minoo Moallem est à la tête du département des «Gender and Women’s Studies» à l’université de Berkeley, en Californie. Son université est l’une des pionnières en la matière, qui a accueilli quelques-unes des plus célèbres théoriciennes du mouvement, comme la Française Monique Wittig ou Judith Butler. Aux Etats-Unis les «études des femmes ou des genres» ont bientôt quarante ans.

    L’âge de la maturité ?

    Beaucoup de chemin a été fait durant ces années. Pas moins de 652 universités proposent aujourd’hui des programmes consacrés aux questions des femmes, du genre sexuel ou de la sexualité. Quarante-six de ces universités proposent des «Master’s degree», et quatorze aussi des «PhD» [doctorat, ndlr], selon les chiffres de la National Women’s Studies Association. Et ce n’est pas fini : de plus en plus d’universités, comme la nôtre, envisagent de créer de nouveaux PhD. Quand tout a commencé dans les années 70, les «Women’s studies» se cantonnaient à quelques cours ici ou là.

    Depuis les années 90, ce sont des départements entiers qui se consacrent à ces études. Leur champ s’est considérablement élargi, et leur intitulé a aussi évolué : on parle moins d’études féministes et davantage d’études des genres ou de la sexualité, ce qui permet d’inclure aussi l’étude de la masculinité. A Berkeley, notre département a changé de nom en 2004 : il ne s’intitule plus «Women’s studies» mais «Gender and Women’s studies». Nous avons aussi beaucoup gagné en légitimité : aujourd’hui un étudiant n’a plus besoin de se battre et se justifier s’il veut étudier une question de genre en sociologie ou en anthropologie, tout le monde convient qu’elle est importante.

    Mais ces études ne sont-elles pas encore un peu méprisées, même aux Etats-Unis ? Et choisies essentiellement par des femmes ?

    C’est moins mauvais qu’auparavant. Il est évident que les études de genre ne sont pas reconnues comme une discipline traditionnelle. Et lorsqu’il s’agit de distribuer les ressources, nous avons de très puissants concurrents. Il est vrai aussi que la plupart des étudiants sont des filles, mais nous avons de plus en plus de garçons.

    Quelles ont été les autres grandes évolutions de ces quarante ans ?

    Les théories étudiées se sont diversifiées. On s’est beaucoup ouvert à l’interdisciplinarité et aux études transnationales. A Berkeley en particulier, on croise la question du genre avec celles de la race ou de l’immigration, avec les questions d’environnement, de mondialisation, des nouveaux médias… La question du changement social et du changement du statut des femmes au sein de la société, qui était très importante à l’origine des études féministes, a aussi évolué. On étudie maintenant aussi le rôle des femmes dans les mouvements sociaux : la signification des organisations activistes et communautaires, ou les ONG.

    Quel a été l’impact de ces études sur la vie publique aux Etats-Unis ?

    L’impact est énorme, il n’est pas seulement politique, mais aussi social, culturel, économique… On voit bien comme la présence des femmes s’est accrue au niveau politique, ou dernièrement à la Cour suprême [Barack Obama vient d’y désigner une femme, qui sera la troisième sur neuf juges, sous réserve de confirmation par le Sénat, ndlr]. Mais on observe aussi que la promotion des femmes peut être contrecarrée par les questions de race, de classe ou de nation. Les femmes de la classe moyenne ont aujourd’hui bien pénétré le marché du travail… mais elles sont remplacées dans le travail domestique par les femmes immigrées, qui gardent les enfants ou font le ménage. La reproduction des rapports de pouvoir se poursuit par le biais des races ou de l’immigration. La question du travail féminin n’est toujours pas résolue. On n’est pas du tout au bout du chemin.

    414px_Lib_ration Lien article Libération.fr ici

     
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    C
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